La Cour suprême des États-Unis a annulé l'arrêt historique « Roe versus Wade » sur le droit à l'avortement. L'arrêt Roe vs Wade a constitué une étape historique dans la lutte pour le droit à l'avortement. « Roe » est le pseudonyme de la femme qui a poursuivi l'État du Texas en 1969 parce qu'elle estimait avoir droit à un avortement. La femme en question a perdu le procès (et a accouché) mais a tout de même porté l’affaire jusqu'à la Cour suprême. En 1973, la Cour a jugé que la loi texane sur l'avortement était inconstitutionnelle. L'avortement est dès lors devenu un droit dans tout le pays.
À présent que cet arrêt a été annulé, chaque État est libre de prévoir sa propre législation sur l’avortement. L'avortement est ou deviendra dès lors bientôt illégal dans de nombreux États, même lorsque la vie de la mère est en danger ou que la grossesse est le résultat d'un viol ou d'un inceste.
Le droit à l'avortement était sous pression depuis longtemps déjà, mais le mouvement conservateur a finalement obtenu gain de cause. Pour comprendre comment cela a pu se produire, il est important de mieux comprendre le système américain.
La Cour suprême est la plus haute juridiction fédérale du système judiciaire américain et se compose de neuf juges. Les juges sont nommés par le Sénat après nomination par le Président. En principe, ils sont nommés à vie. Étant donné qu'ils sont nommés par le Sénat après avoir été désignés par le Président, il est logique que la personne au pouvoir à ce moment-là fasse une grande différence. Ainsi, en 2018, malgré les protestations, Trump a tout de même nommé le juge conservateur Brett Kavanaugh, qui était de plus sous le feu des critiques pour avoir été accusé de viol.
Cinq juges ont voté pour l’annulation de Roe vs Wade. Trois d'entre eux ont été nommés par Trump, les deux autres par George W. Bush.
L'un des juges, Clarence Thomas, a déjà fait savoir qu'il restait des arrêts de la Cour suprême à réexaminer : le droit à la contraception (arrêt Griswold), aux relations homosexuelles (arrêt Lawrence) et au mariage homosexuel (arrêt Obergefell). Bien que les autres juges déclarent que l’on ne touchera pas aux autres droits acquis, ceux qui vivent aux États-Unis connaissent actuellement des moments d’angoisse. Cela prouve une fois de plus que nos droits acquis ne le sont jamais pleinement et qu'il est important de disposer d'un contrepouvoir qui portera toujours un regard critique sur la politique.
Chez nous non plus, le droit à l'avortement n’est pas incontesté. En 2020, certains ont plaidé pour un assouplissement des règles relatives à l'avortement. Par rapport à ses voisins, la Belgique a en fait une législation assez stricte. Le CD&V comme le Vlaams Belang s'y sont opposés à l'époque. La discussion a émergé lors des négociations pour le gouvernement fédéral. Le CD&V a même déclaré alors que si la loi sur l'avortement était assouplie, il faudrait former un gouvernement sans eux.
Le Vlaams Belang va encore plus loin et déclare que l'avortement ne doit être possible que lorsque la vie de la femme est en danger, lorsque l'enfant à naître n'est pas viable et en cas de viol. Rien de surprenant, le Vlaams Belang et l'extrême droite ne défendront jamais les droits des femmes.
Heureusement, la Belgique, ce n'est pas les États-Unis. Notre législation sur l'avortement est le fruit de majorités parlementaires et ne sera pas rapidement abolie. Toutefois, ces mêmes forces conservatrices œuvrent ici aussi à faire reculer nos droits.
De plus, les déclarations du juge Thomas démontrent à nouveau que lorsqu’un seul thème fait l’objet d’une attaque, ce sont plusieurs aspects qui sont menacés. Nous devons rester vigilants en continuant de nous battre pour nos droits.
Nous devons également être solidaires des femmes du monde entier qui n'ont pas accès à un avortement légal et sûr. Nous devons être solidaires des femmes qui meurent parce qu'elles ont subi un avortement dangereux. Nous devons être solidaires des femmes qui sont interrogées par la police ou condamnées après une fausse couche. Nous ne devons pas oublier qu'il n'y a pas qu'aux États-Unis que l'avortement est criminalisé. Et nous ne devons certainement pas commettre l'erreur de penser qu'une telle chose ne peut pas se produire ici.
C’est pourquoi la FGTB exige la dépénalisation complète de l'avortement, l'allongement du délai à 20 semaines, la suppression du délai de réflexion obligatoire, ainsi qu’un ancrage dans la Constitution afin que personne ne puisse nous retirer ce droit si facilement.
Le droit à l'autodétermination est primordial : « mon corps, mon choix » !